Les marionnettes de l'époque Edo
Jusqu’à samedi dernier, pour nous, les marionnettes au Japon étaient toujours associées au Bunraku, le célèbre théâtre japonais de marionnettes où chaque marionnette de grande taille est contrôlée par trois marionnettistes en même temps. Grâce à notre amie S., nous avons eu la chance de découvrir un autre type de marionnettes japonaises, celles de l’époque Edo (Edo-Ito Ayatsuri Ningyo).
M. Mitsuru Kamijo est un marionnettiste du Edo Marionette Group, des marionnettes traditionnelles japonaises qui nous arrivent directement de la période d'Edo. Ces marionnettes sont du type courant contrôlé par des ficelles. Ici, les marionnettes d’environ 45 centimètres de hauteur sont contrôlées par jusqu'à 25 ficelles. Cela permet un contrôle extrêmement précis de toutes les parties du corps et des membres, dans n'importe quelle direction, et permet donc d’exprimer toutes sortes d'attitudes. Ces ficelles sont divisées en deux groupes, les trois principales (kiki-ito) pour le contrôle de la tête et des épaules, et les autres, les asobi-ito, pour le contrôle plus fin de toutes les autres parties.
Sur son site Web, j'ai découvert que M. Kamijo était un ingénieur technique qui a commencé à travailler avec des marionnettes il y a 25 ans. Il voulait en savoir plus sur la culture japonaise et son âme, cela parce qu'il estimait que les Japonais perdaient graduellement leur identité. C'était en 1979, l'année où je suis arrivé au Japon. Son groupe, le théâtre de marionnettes Youkiza crée maintenant des pièces modernes sur la base de techniques traditionnelles.
L'endroit, un petit théâtre au milieu d'un beau parc (Hyakkaen) a été choisi parce qu'il est le seul théâtre aujourd'hui à Tokyo qui permet aux spectateurs de boire. Oui, manger et boire faisaient partie intégrante d’une sortie au théâtre pendant l'ère d'Edo, et ce point était important pour M. Kamijo. Il n’y avait de place que pour environ 35 personnes.
La séance a commencé par une présentation et une explication des marionnettes, un petit mot sur leur histoire, et d'une description des différences entre les caractères d'homme et de femme. Les marionnettes de personnages masculins sont plus grandes, ont des pieds, mais n'ont pas des fesses. Elles comportent à la place une simple corde. C’est pour permettre plus de liberté de mouvement aux jambes. Les marionnettes de personnages féminins n'ont pas de pieds (nous ne les verrions pas sous les longs kimonos) mais ont un derrière, et n’ont donc que des mouvements très limités de leurs jambes -- cela pour représenter la retenue des mouvements et des gestes des femmes japonaises portant un kimono. D'autre part, leur tronc est évidé et articulé avec de nombreuses cordelettes pour permettre des mouvements très détaillés de la posture de leur corps.
Nous avons vu plusieurs petites pièces.
Kappore était une danse très populaire exécutée par des hommes dans la rue quand Tokyo s'appelait encore Edo.
Yoidore, l’ivrogne. Pendant l'ère d'Edo, les gens aimaient bien danser d'une manière drôle en écoutant une joyeuse musique de flûtes et de tambours. Le mimétisme presque parfait entre le marionnettiste et la marionnette était impressionnant — c’était M. Kamijo qui était en train de danser, ivre.
Shishimai, danse du lion, qui existe dans plusieurs régions d'Asie. Les gens croient que si un lion rugit fort, les mauvaises choses comme les maladies et les insectes gênants disparaîtront. Ici, nous nous sommes rendus compte que M. Kamijo contrôlait directement non seulement le lion, mais aussi les deux petits hommes sous le costume du lion !
La dernière pièce, Setsubun, faisait participer un humain et un Oni, vous savez, ces petits gremlins qui sont chassés avec des haricots. On s’est bien amusé !
Allez voir le site Web de M. Kamijo, et si vous avez la chance de voir cette présentation, ne la manquez sous aucun prétexte.